1910 : Naissance le 31 mai à La Pacaudière (Loire)
Etudes à Saint-Hugues et au séminaire d’Autun
1938 : Ordonné prêtre le 29 Juin à Autun
1938 : Vicaire à La Clayette
1940 : En juin, aumônier de prisonniers en Allemagne
1946 : Curé de Buffières, Curtil et Bergesserin
1968 : Déchargé de Bergesserin, il reçoit la charge de Sivignon
2002 : Décède le 2 janvier à Buffières
Celui que les B’firons appelaient « notre pasteur » avait une figure attachante, parce qu’elle s’était imprimée dans l’âme de ses villages tout au long de ces 55 années de présence, parce qu’il a vécu son ministère sacerdotal avec droiture et constance. Il fut à la fois l’homme de la fidélité et celui de la liberté.
Fidélité tout d’abord. Fidèle à sa famille dont les portraits habillaient les murs de son presbytère et les souvenirs de son cœur. C’est aux confins du Forez et du Brionnais où reposent ses grands-parents qu’il acquit chez les siens le sens du service des autres et celui de la Patrie à la veille de la Grande Guerre. Le sens de la foi catholique lui devient tout naturel, à la suite de son frère séminariste prématurément disparu et à l’ombre de la figure de l’oncle, le chanoine Burnot. Fidèle à son milieu, il le fut aussi à lui-même. Jamais il ne sut dire des choses et les vivre autrement qu’il les voyait et les pensait. Parfois en porte-à-faux, il ne s’est jamais senti ébranlé : ce qu’il avait reçu était de sources sûres. Fidélité aussi à l’état sacerdotal qui lui fut conféré par Mgr Chassagnon le 29 juin 1938.
Et Dieu sait si ses premières expériences (après un court temps de vicariat à La Clayette) avaient de quoi dérouter le jeune homme qui se retrouve en Allemagne en juin 1940 comme aumônier de prisonniers dont le premier accueil fut rien moins que glacial. Et c’est là, au milieu d’anticléricaux, de musulmans, mais aussi de quelques chrétiens solides qu’il découvre tout à la fois ce que sera son ministère et ce qu’il était lui-même. « Les hommes sont faits pour s’entendre et peuvent s’entendre ». Les liens tissés alors le furent pour la vie. Un exemple émouvant : alors qu’on ramenait son corps au presbytère mercredi soir, le téléphone sonne : d’Algérie des amis musulmans présentaient déjà leurs condoléances !
Nommé curé de Buffières où il célèbre la messe la première fois le 7 avril 1946. Il sait désormais ce qu’il doit être : l’image du Bon Pasteur, celui qui n’abandonne pas ses brebis, celui qui marche devant elles mais partage avec elles les mêmes sentiers et les mêmes climats, l’image de la bonté, de la proximité, de la fidélité de Dieu. L’expérience de la guerre et de la captivité aurait pu relativiser ce qui avait été reçu auparavant, l’abbé Biétron y retrouva au contraire les valeurs d’éternité capables d’éclairer toute situation, d’illuminer chacune de nos existences. « C’est ce que j’ai reçu, qu’à mon tour je vous ai transmis », aurait-il pu dire à la suite de saint Paul. Acceptant par là qu’on puisse le considérer de haut et le marginaliser dans un certain milieu, il conserva les formes traditionnelles de la vie sacerdotale et paroissiale, par fidélité certes, mais aussi par sagesse.
Homme de liberté. Celui qui fut captif plusieurs an-nées a su le prix de la liberté et a appris qu’elle devait déjà être intérieure. De la même façon que sa soutane lui était devenue inséparable, il avait su calquer parfaitement sa vie avec sa fonction au point qu’elle lui apparaissait comme une autre nature. Et cependant que de liberté chez ce prêtre ! Non pas la liberté qui justifie pour soi n’importe quoi, mais celle du sage. Les différences, les divergences, dira-t-il, en matière de culture, de niveau social, de convictions ne peuvent empêcher les êtres humains de se rencontrer. Que de discrétion et de délicatesse à l’égard de l’autre communauté spirituelle qui compose sa paroisse et lui valent aujourd’hui l’hommage unanime de tous les habitants de Buffières ! Sait-on encore les liens privilégiés qu’il entretenait avec Taizé, dont le message de condoléances envoyé par frère Roger redit ces liens inattendus de “Père spirituel’’ à l’égard de la communauté. Sait-on la variété des relations qu’il entretenait sur toute la France et au-delà, le nombre de visites qui obligeait à prendre rendez-vous avant de monter à Buffières ? Liberté aussi par rapport à lui-même et à l’image qu’il donnait de lui-même, liberté par rapport aux honneurs et à l’ambition, liberté par rapport au poids du rouleau compresseur de la pensée unique et puis cette dernière conquête, la dernière, la plus difficile : la liberté de dire enfin au Seigneur : Voilà, il faut quitter ce monde qui passe, Seigneur, je suis prêt.
Eglise d’Autun – Père Alain Boussand