Serouya, fille de harki, à l’école d’un village du Morvan découvre quelque chose de la vie des chrétiens. Un long chemin s’ouvre qui la mènera au baptême
Antoinette, grand-mère de 53 ans, avait demandé le baptême à 18 ans, puis à 27 ans. Cela n’avait pas été entendu.
Patrick, 36 ans, Congolais, malade, prie avec sa mère depuis longtemps. Son père était musulman, il ne pouvait être baptisé. Le père mort, la porte s’ouvre.
Sylvie était venue à l’église le dimanche pendant ses vacances chez la grand-mère en Espagne.
Claude, il lui manquait quelque chose : ses camarades de classe allaient au catéchisme, lui racontaient même ce qu’elles y faisaient ; mais elle, rien. Elle n’était pas comme les autres.
Ophélie a longtemps galéré dans son enfance et sa jeunesse. A vécu en foyer. Elle veut changer de vie et c’est « Bouge Ta Galère » qui le lui rend possible. Elle demande le baptême à l’occasion d’une célébration de mission ouvrière.
Martine et Fabienne, deux sœurs, de famille tout à fait étrangère à l’Eglise, rencontrent la JOC. Vingt ans plus tard, Jean-Luc, intègre l’équipe fédérale JOC. Lui aussi, petit à petit, par les révisions de vie et les temps de formation, découvre qu’on peut bâtir sa vie avec le Christ.
Eugénie, 93 ans, en maison de retraite, rayonne de joie le jour de son baptême qu’elle n’osait plus espérer. C’était son désir de toujours de devenir chrétienne.
Thomas, à l’âge du collège, s’interrogeait déjà sur le sens de sa vie. Sa rencontre avec Béatrice, après un grave accident de moto, lui apporte une réponse claire. Et le baptême sera pour lui le plus beau jour de sa vie, bien au-dessus de celui de son mariage avec Béatrice
Phu, qui a fui la terreur des Khmers rouges à travers la forêt, s’étonne de voir les chrétiens être les seuls à venir en aide aux réfugiés des camps de Thaïlande. En France, il rencontre Brigitte, venue comme lui du Cambodge, toute retournée par l‘accueil des chrétiens du Creusot.
Suzanne, professeur de collège à la retraite, impressionnée par la qualité de vie de son mari, devenue veuve, décide de s’ouvrir elle aussi à la vie du Christ.
Maurice, professeur de maths, a exploré tout sa vie les différentes familles spirituelles. La foi des chrétiens lui apporte la paix.
Arrivés du Vietnam au temps des boat people, ou du Laos tombé sous la coupe d’un gouvernement com-muniste, Vietnamiens et Hmongs, font le choix de la vie chrétienne. Venus du bouddhisme, ou de la religion traditionnelle des hauts plateaux, quel chemin !
Stéphanie, des gens du voyage, sait à peine lire. Sa vie n’est pas facile.
Depuis les années 60, des dizaines d’hommes et de femmes, jeunes le plus souvent, ont frappé à la porte de l’Eglise, chez nous, en Saône-et-Loire, et le flot est loin d’être tari. En majorité originaires des milieux populaires. Les demandes de baptêmes, ça n’était pas rare auparavant ; parfois les prêtres en faisaient la condition pour se marier. On y répondait comme on pouvait, pensant bien faire en copiant ce qu’on faisait avec les enfants, catéchisme et baptême.
Mais avec la multiplication des demandes, on a été amené à revoir ces pratiques. Dès le début des années 50, à Lyon, le père Cellier s’inspirait de la grande tradition du catéchuménat des pères de l’Eglise, Ambroise, Chrysostome, Cyrille de Jérusalem, Hilaire de Poitiers et autres, pour donner une réponse institutionnelle à ce besoin nouveau : répondre à la demande de ces nombreux adultes. Ailleurs qu’à Lyon, on cherchait aussi à répondre à ces besoins nouveaux. Et ailleurs qu’en France… sans compter les pays de mission.
En 1965, le Concile Vatican II répond à ces recherches : « On restaurera le catéchuménat des adultes, distribué en plusieurs étapes, dont la pratique sera soumise à l’autorité de l’ordinaire du lieu : on obtiendra ainsi que le temps du catéchuménat, destiné à une formation appropriée, puisse être sanctifié par les rites sacrés dont la célébration s’échelonne dans le temps ». (La Saint Liturgie 64).
Le catéchuménat, dans les années 60, c’est dans l’air du temps. Chez nous, on répond du mieux possible aux demandes, souvent isolées. Mais c’est dans le Bassin Minier que surgit une forte demande. On constitue autour de chacun des demandeurs une équipe d’accompagnement, autant que possible respectueuse de l’environnement des personnes et de leur culture. Beaucoup viennent de ce monde ouvrier qui s’est coupé de l’Eglise au moment des grandes grèves de 1899 et 1901 : elle était ressentie comme le relais du patronat ou, au moins, de mèche avec lui, jusque dans le milieu du siècle dernier.
Peu à peu, on sent le besoin de se concerter, de partager les expériences, de réfléchir au contenu et à la pédagogie de l’enseignement avec la direction de l’Enseignement religieux. Plusieurs fois le père le Bourgeois vient lui-même célébrer baptêmes, confirmation et eucharistie à la veillée pascale de Notre-Dame de Montceau.
Un embryon d’équipe diocésaine se forme, fait se rencontrer les différents acteurs des lieux où cheminent des catéchumènes, propose des temps de formation aux accompagnateurs, rejoint le catéchuménat de la région Centre-Est à Lyon. On est dans les années 1977-1978.
En novembre 1977, plusieurs participent à la rencontre nationale du catéchuménat et se font l’écho dans les mois suivants de la réflexion sur la liturgie du catéchuménat, critères de révision d’une liturgie catéchuménale :
1 – Quoi d’humain a été exprimé ? Comment ?
2 – Quelle foi a été exprimée ? Par quels rites, gestes, individuels ou collectifs ? Dans quel langage ?
3 – Qu’est-ce qui a semblé parlant pour des non-croyants ?
4 – Comment avons-nous permis aux gens de s’exprimer ?
De l’élaboration de critères pour les accompagnateurs :
1 – Respect du cheminement de la personne, de la durée, du rythme, des délais.
2 – Annonce explicite de la Bonne Nouvelle.
3 – Mise en lien avec la communauté.
4 – Respect de la culture des langues et du milieu.
5 – Accueil des interrogations venant de la non-croyance.
En 1979, le père Le Bourgeois et son conseil épiscopal chargent Pierre Bouthière de piloter le travail des équipes de catéchuménat : l’équipe diocésaine prend corps, faite de délégués de chaque lieu où cheminent des catéchumènes. L’équipe se réunit environ quatre fois par an, propose des formations aux accompagnateurs : le cheminement catéchuménat – les étapes liturgiques, les sacrements de l’initiation – discerner si le catéchumène peut franchir une étape – croire en Dieu, croire en Jésus Christ – l’attention aux cultures des catéchumènes – l’expérience de Dieu – l’enracinement humain et ecclésial – relire son histoire – relire le cheminement – fragilités psychologiques. Elle délègue certains de ses membres aux rencontres régionales du catéchuménat à Lyon. Elle en envoie aux Assises nationales du catéchuménat en avril 1985, aux sessions nationales, aux week-ends de formation des nouveaux membres des équipes diocésaines. Plusieurs fois elle rencontre le Conseil épiscopal.
Pierre Bouthière, en 1992, laisse la place de délégué de l’évêque à Jean Forgeat. En 1996, après une année de vacances où l’équipe diocésaine s’est autogérée, Marcel Cortey prend la relève. Aujourd’hui, depuis 2008, c’est Madame Françoise Prost qui est déléguée de l’évêque pour le catéchuménat.
Des chiffres ?
Entre 1965 et 1970 : environ 80 catéchumènes
En décembre 1979 : 22 Hmong de 3 familles et 2 cambodgiens à Chalon, 2 jeunes Vietnamiennes à Tournus, 5 Vietnamiens à Montceau
Au conseil épiscopal du 1er février 1980 : 113 demandeurs, dont 107 de monde ouvrier (3 en A.C.O. et un responsable fédéral JOC, 21 parmi les plus pauvres) et 6 des milieux indépendants ; 54 baptêmes
En 1990, 35 catéchumènes (1 Juif, 1 Arabe, 15 du Sud-Est asiatique, 18 français), 17 néophytes (3 hommes, 14 femmes, 2 Kabyles, 1 Laotiens, 14 Fran-çais)
En 2012, 22 personnes sont appelées aux sacrements de l’initiation, baptême, confirmation et eucharistie, parmi lesquelles12 adultes Hmongs de 23 à 70 ans
Une belle aventure qui se poursuit. Avec beaucoup de joie. Et des questions, douloureuses : les néophytes ont souvent bien de la peine à rejoindre les communautés d’Eglise, paroisse, mouvements ; et l’obstacle des situations « pas dans la norme », les personnes divorcées remariées, ou mariées à un divorcé. Et celles-ci, particulièrement dans nos pays de vieille chrétienté : beaucoup d’attention et de soin à accompagner les adultes en recherche de foi, et des baptêmes de petits enfants qui n’ont pas de suite.
Dominique PIGNAL